Comment le piratage téléphonique fait perdre des millions de dollars à la RDC

Téléphone. Radio Okapi/ Ph. John Bompengo

Au début du mois d’octobre, le gouvernement congolais a annoncé le démantèlement d’un réseau de piratage d’appels de téléphonie mobile qui lui faisait perdre près de 12 millions de dollars américains chaque mois. La police et le ministère des Postes, Téléphones et Nouvelles technologies de l’information et de la communication (PT-NTIC) expliquent que ces fraudeurs faisaient apparaître les appels venant de l’étranger comme émis en RDC grâce au Sim Box. Ce boîtier électronique permet donc de se soustraire aux tarifs de terminaison et aux taxes en vigueur en RDC. Tentative d’explication de cette fraude que le gouvernement veut combattre.

Un Sim box est un boitier électronique qui dispose de plusieurs cartes sim. Il peut gérer jusqu’à un million de minutes par mois.

Ce boitier fonctionne avec un équipement complet de télécommunication comprenant notamment un routeur et une antenne relais communément appelée BTS.

L’équipement que nécessite cette technologie, indiquent les experts, se vendent sur le marché dans les pays développés comme n’importe quel article. Certaines entreprises de ces pays utiliseraient cette technologie pour décentraliser certains appels internes via Internet.

La fraude par Sim Box, comment ça marche ?

Le Sim box transmet les appels par l’Internet grâce aux IP. Si la fraude est organisée à partir de la France par exemple, un premier IP reçoit directement les appels des réseaux locaux français, complices de la fraude, ou il intercepte ces appels à partir d’un carrier avant de les envoyer par Internet sur un IP à Kinshasa.

Un routeur transforme ensuite les données en local et les envoie dans le Sim box qui, à travers ses différentes cartes SIM, les dispatche à son tour automatiquement selon les réseaux téléphoniques que compte le pays.

C’est grâce à une antenne relais ou BTS que le Sim Box envoie ces appels à ces réseaux. C’est ainsi que l’appel parvient aux correspondants destinataires. Ainsi, vous pouvez recevoir un appel de la France et voir apparaître sur votre téléphone un numéro local. Les appels émanant des Sim box sont généralement de mauvaise qualité.

Une hémorragie financière

Le piratage téléphonique prive à l’Etat congolais de l’argent provenant de la taxation des appels entrants.

En principe, les opérateurs comme Vodacom, Airtel, Tigo, Orange ou Africell gèrent les appels venant de l’étranger avec des carriers ou transporteurs, des firmes qui disposent des boulevards ou autoroutes de télécommunication. Il s’agit notamment de France Télécom, Belgacom ou encore British Télécom.

Ce sont ces carriers qui dirigent les appels internationaux vers le RDC et vice-versa. Ces opérations ont un coût facturé à la minute selon les pays. Sur chaque minute d’appel entrant, le gouvernement congolais a imposé une taxe de 25% soit 0,008 dollars américains.

En détournant ces appels entrant grâce au Sim Box, les pirates paient jusqu’à trois fois moins cher puisqu’ils présentent l’appel comme local.

Combattre la fraude

Des experts s’accordent pour dire que les fraudeurs qui ont recourent au Sim Box bénéficient de certaines complicités.

Plusieurs indices révèleraient ces complicités. Ces experts s’étonnent que les équipements de Sim box soient importés en RDC sans que cela n’alerte personne.

Ils pointent également du doigt le fait que l’installation de ce matériel (une antenne parabolique notamment) nécessite l’aval de l’autorité de régulation.

Des sources proches des opérateurs de télécommunication indiquent que les sites abritant le matériel utilisé par les pirates sont connus. Il s’agit notamment des Immeubles Sozacom, Botour et De la Presse à Kinshasa.

Faute de matériel adéquat pour détecter les appels frauduleux, les opérateurs en télécommunication indiquent se limiter à boucher les Sim utilisées par ce réseau maffieux.

En novembre 2012, le gouvernement avait signé un contrat avec un consortium franco-américain Agilis International et Entreprise Telecom chargé de mettre fin à ce piratage.

Des sources proches des opérateurs téléphoniques affirment que le gouvernement a annoncé le démantèlement de deux réseaux mafieux pour «sauver l’image d’Agilis » qui, à en croire ces sources ne serait pas à la hauteur de sa tâche, faute d’équipements.

D’autres pays africains comme le Togo, le Ghana, la Côte d’Ivoire et le Congo font face à ce problème. Dans ces pays, les opérateurs téléphoniques mettent progressivement en place des systèmes de tracking et de protection avec le concours de spécialistes américains ou européens.

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