En RDC, l’élection présidentielle s’éloigne, le pouvoir réprime

En République démocratique du Congo (RDC), un angoissant compte à rebours est enclenché, menaçant de replonger le géant d’Afrique centrale dans une nouvelle période d’instabilité. Ces inquiétudes se fondent sur deux inconnues : quand aura lieu l’élection présidentielle, prévue théoriquement le 27 novembre mais dont le report est d’ores et déjà acquis ? Que fera Joseph Kabila, le chef de l’Etat, le 19 décembre au soir, lorsque son second et dernier mandat aura officiellement expiré ?

Les manifestations lancées à l’appel des principaux partis d’opposition qui n’entendent offrir aucun délai supplémentaire au président sortant démontrent que la rue congolaise demeure hautement inflammable. Organisées dans plusieurs villes du pays, lundi 19 septembre, date à laquelle aurait dû être convoqué le corps électoral, elles se sont soldées dans la capitale par des violences meurtrières. Rassemblés derrière le slogan sans équivoque « Kabila dégage ! », les manifestants n’ont pas tardé à se confronter aux forces de l’ordre. A Kinshasa, aux pierres et à la colère des contestataires qui ont immolé par le feu un policier, incendié une permanence du parti au pouvoir et quelques véhicules, policiers et soldats de la garde républicaine ont répondu par des tirs de gaz lacrymogènes et à balles réelles. Répétant une stratégie déjà bien rodée, les forces de l’ordre avaient au préalable empêché les opposants de converger vers le centre-ville.

Inquiétude des Occidentaux

Le ministre de l’intérieur, Evariste Boshab, a dénoncé « un mouvement insurrectionnel ». Selon son bilan « provisoire » donné lundi en milieu d’après-midi, les heurts dans la capitale ont fait 17 morts, 3 policiers et 14 civils « parmi les pillards ». L’opposition, dont les permanences de cinq partis ont été détruites dans la nuit de lundi à mardi, faisait état, mardi après-midi, d’un bilan de « plus ou moins 80 morts », d’après Bruno Tshibala, le porte-parole de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS). L’ONG Human Rights Watch évoque quant à elle « au moins 37 personnes tuées par les forces de sécurité ».

Des opposants ainsi que la correspondante de RFI et un photographe de l’AFP ont été interpellés en marge des manifestations. Mardi, le Rassemblement, principale plateforme de l’opposition, a appelé à poursuivre la mobilisation en vue d’obtenir le départ de Joseph Kabila. Kinshasa était quadrillée par les forces de l’ordre. Des tirs étaient entendus et des violences signalées dans plusieurs quartiers de la capitale où les écoles et la majeure partie des commerces sont restées fermées. A Ndjili, près de l’aéroport, un cadre de l’UDPS raconte que des affrontements à l’arme automatique ont éclaté entre la garde républicaine et des « jeunes » ayant subtilisé la veille des fusils aux policiers.