RDC: "Fièrement Ndundu", les albinos en quête de reconnaissance

"Renforcer la visibilité des albinos dans les hautes sphères, créer des modèles pour permettre aux parents d'enfants albinos de ne pas en avoir honte". Ce sont les objectifs de Yan Mambo, organisateur du festival militant "Fièrement Ndundu", qui s'achève samedi à Kinshasa. 

L'albinisme est une maladie génétique qui se caractérise par une absence de mélanine dans la peau, les cheveux et les yeux. Ce déficit rend les albinos - "ndundu" en langue lingala - très sensibles aux rayons du soleil et ils sont particulièrement sujets au cancer de la peau.

Dans certains pays, comme le Burundi et la Tanzanie, voisins de la République démocratique du Congo, on les assassine pour des rituels censés apporter richesse et pouvoir. Mais le plus souvent, ils sont victimes de discrimination à l'école, au travail et en famille. 

"Dans ma famille, c'est moitié-moitié: quatre Noirs et quatre Blancs!", plaisante Michel, un avocat issu d'un "milieu éduqué" où il n'a "jamais" été discriminé. "La famille joue un rôle très important: un albinos, s'il n'est pas protégé, pas aimé, il ne pourra pas aller de l'avant." 

Mais pour "aller de l'avant", il faut franchir de nombreux obstacles. Les albinos souffrent de graves problèmes de vue et les lunettes sont pour beaucoup hors de prix en RDC, pays riche en minerais mais où la majorité de la population vit dans la misère. 

La photographe belge Patricia Willocq avait souligné ces problèmes de scolarité en février 2014 à Kinshasa lors de son exposition "Blanc Ebène", qui raconte la vie des albinos à travers notamment des histoires d'amour, d'amitié, de complicité, de fraternité. 

Pourtant, même diplôme en poche, Michel estime qu'un albinos doit redoubler d'efforts pour prouver sa valeur. "Tu pars avec un facteur défavorisant, alors il faut faire plus d'efforts pour te faire remarquer, te faire valoir. Moi, tous les jours, j'en fais un peu plus." 

Le festival "Fièrement Ndundu" - qui s'est ouvert jeudi à l'Université protestante du Congo et doit s'achever samedi par une grande marche et des concerts - espère bien inverser la tendance. 

- Créer des élites ndundu -

 

"On met en avant l'excellence, parce que dans la société congolaise, il n'y a presque pas d'élite ndundu, même dans le gouvernement congolais. Dans le showbiz, on n'a pas un Fally Ipupa ndundu ou un Papa Wemba ndundu", explique Yan Mambo, réalisateur des clips du grand rappeur congolais Lexxus Legal. 

Il fait allusion au fait que son pays n'ait pas un chanteur albinos reconnu comme le Malien Salif Keita. Partie remise: son mouvement anti-discrimination "Plus de couleurs" entend promouvoir la carrière de Christian Muyoli, qui a récemment fait sensation lors d'un concours de chant. 

"On veut ouvrir une vitrine socio-culturelle pour les élites mais aussi en créer", souligne-t-il, projetant aussi d'aider Serge Kanyinda, qui a joué dans le film "Rebelle" de Kim Nguyen, nominé aux Oscars en 2013 et qui décrit l'enfer des enfants-soldats.