On viole en silence dans les territoires oubliés

Dans son poignant film, Congo, un médecin pour sauver les femmes, la jeune réalisatrice sénégalaise, Angèle Diabang, signe un véritable cri du cœur sur la situation des femmes victimes de violences sexuelles au Congo. Mutiler le corps des femmes est devenu un amusement quotidien d’hommes en armes dont on ne sait plus finalement pourquoi ils combattent.

L’est de la RDC est devenu une zone de non-droit où la barbarie côtoie l’horreur, entre morts, viols et déplacements forcés de populations. Tout a été dit sur le Congo au point que le monde n’a plus le temps ni l’énergie de s’indigner. On arrive à se résigner face à la banalité du mal qui a posé ses valises sur une région devenue un véritable enfer sur terre.

Ces exactions imputées à l’armée régulière congolaise et à la flopée de groupes armés dans le pays ne sont pas une spécificité de la RDC. Mais devant l’indignation que suscite le viol comme une arme de guerre, on en arrive à oublier ce viol « banal », au coin d’une rue, derrière un arbre.

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Cette pratique systématique dans les zones de conflit sur des populations vulnérables commise aussi par des « anges gardiens » du monde. Récemment, des accusations de viol ont été portées contre des militaires français ou des éléments du contingent des Nations unies en Centrafrique : 14 soldats français de la force Sangaris sont soupçonnés d’abus sexuels entre décembre 2013 et juin 2014 sur des mineurs.

Récemment, un nouveau scandale explose encore à Bangui sur viol présumé d’un casque bleu sur une fillette. Prise très au sérieux, l’affaire a poussé Ban Ki Moon à réagir en poussant le général Babacar Gaye à démissionner.

Que des bandes armées se signalent par des actes quotidiens de barbarie est devenu une normalité quotidienne dans les territoires oubliés. Aussi, en 2015, voir des casques bleus censés protéger, rassurer et restaurer la paix dans une zone de conflit s’atteler à des actes de viols ne me surprend que peu. On a toujours feint de ne rien voir à l’ONU et dans les pays pourvoyeurs de soldats sur une réalité que beaucoup n’ignoraient plus. Ce qui me choque est cette capacité à transformer le corps humain en un espace d’accomplissement constant d’un funeste forfait.

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La puissance conférée par la détention de l’arme pousse les hommes à imposer une terreur aux femmes et aux enfants dont le seul tort est d’être pauvres, « affamés et sans abris » (selon la formule du Guardian) et de vivre en zone de conflit, en échange « de nourriture ou d’argent ».