Le procureur général près la Cour constitutionnelle a requis, ce mercredi 23 avril, 10 ans de travaux forcés et de servitude pénale contre Matata Ponyo et ses coprévenus dans le cadre du procès relatif à la débâcle du projet agro-industriel de Bukanga-Lonzo.
Séance tenante, l’organe de la loi a ordonné l’arrestation immédiate de l’ancien Premier ministre, qui écope également de 10 ans d’inéligibilité.
Une peine de 5 ans d’inéligibilité a été requise contre l’ancien gouverneur de la Banque centrale du Congo, Déogratias Mutombo, ainsi que l’expulsion définitive de l’homme d’affaires sud-africain, Christo Grobler Stephanus, du territoire national.
La Cour a jugé les prévenus par défaut après avoir instruit le fond de l’affaire, notamment à travers les dépositions des inspecteurs des finances, qui ont enquêté sur la débâcle du projet Bukanga-Lonzo. La cause est désormais prise en délibéré, et le verdict de la Cour est attendu pour le 14 mai prochain.
En réaction à la démarche du prévenu Matata Ponyo, le président de la Cour a rappelé que la Constitution consacre la séparation des pouvoirs. Dieudonné Kamuleta a précisé qu’« il n'existe aucune disposition légale permettant à l’Assemblée nationale d’injonction à la Cour constitutionnelle, et aucun acte officiel de l’Assemblée ne fait obstacle à la procédure judiciaire en cours ».
Il a ajouté : « Les députés peuvent s’exprimer, mais l’institution Assemblée nationale n’a pris aucune décision. »
Les dépositions des inspecteurs des finances ont mis en lumière que 83 % des fonds décaissés pour le projet Bukanga-Lonzo ont été transférés en Afrique du Sud à la société AFRICOM et à d’autres entités, sans appel d’offres. Plus de 280 millions de dollars engagés dans cet investissement se sont évaporés.
Qui était Africom ? S’interrogent-ils. Il s’agissait d’une société holding, ne gérant que des filiales, sans activités propres, et qui n’avait que 3 ans d’existence au moment de la signature du contrat. Par conséquent, elle ne disposait d’aucune expertise dans ce domaine, selon l’Inspection générale des finances (IGF), qui évoque également d’autres sociétés fictives ayant perçu de grosses sommes d’argent sans contrepartie.
Le président de la Cour a interrogé les inspecteurs sur la responsabilité de l’ancien Premier ministre, étant donné qu’il ne gérait pas directement les fonds. L’IGF a répondu :
« Tout était piloté par le Premier ministre. Toutes les dépenses étaient effectuées avec son autorisation, étant donné que l’ancien ministre des Finances n’était qu’un ministre délégué près de lui. »
Le procureur a renforcé cette position, affirmant que la conception et la mise en œuvre du projet Bukanga-Lonzo étaient l’œuvre exclusive de Matata Ponyo. Il n’a associé aucun ministre sectoriel à ce projet. Sur l’ensemble des sommes sorties du trésor public, seuls 34 millions USD ont été effectivement affectés au projet, selon le parquet.
Les trois prévenus, régulièrement convoqués selon le procureur général près la Cour, étaient absents à cette audience. Le député national Augustin Matata avait déjà écrit au président de la Cour constitutionnelle pour signifier son refus de comparaître, s’appuyant sur une décision de l’Assemblée nationale visant à régulariser la procédure.
De leur côté, Christo Grobler, le Sud-Africain responsable de la société AFRICOM, et Déogratias Mutombo, ancien gouverneur de la Banque centrale du Congo, se sont excusés respectivement pour des raisons de santé et pour des soins à l’étranger.