Un magistrat agressé à Bukama pour un jugement de viol d’une mineure, indignation à Kinshasa

Le magistrat chef du parquet secondaire du territoire de Bukama, dans le district du Haut-Lomami, au Katanga, Charles Kabozia, a été agressé le week-end dernier et sa résidence incendiée par une foule en colère. D’après les sources, la foule reprochait à ce magistrat d’avoir arrêté une personne reconnue coupable de viol sur une fillette de 9 ans et d’avoir rendu un jugement contre le mariage d’une fille de 13 ans.

Le magistrat Kabozia a été tabassé et blessé.

Il a été évacué avec l’aide de la Monusco vers l’hôpital  Don Bosco de Lubumbashi pour des soins appropriés.

Les sources indiquent que le parquet de Bukama a également été dévasté.

A Kinshasa, le parquet général de la République a exprimé son indignation.

Selon le procureur général de la République intérimaire et 1ere avocat général de la République, Safari Kasongo, son institution est déterminée à combattre les violences sexuelles en RDC.

Il a déclaré:

«Nous devons rigoureusement réprimer les cas de viols dans ce pays où le viol est signalé un peu partout dans l’Est de la République. Le parquet ne va pas reculer face à ces intimidations. Nous allons tout faire avec l’aide de la police pour déployer une équipe spéciale et descendre à Bukama avec le concours des autorités politico-administratives de la province pour que l’on puisse rechercher ces criminels, procéder à leur arrestation et les traduire devant les juridictions de jugement.»

Par ailleurs, le PGR intérimaire s’est dit d’autant plus indigné que «ceux-là mêmes qui nous ont toujours accusés d’inertie et de passivité, notamment les ONG des droits de l’homme, ne réagissent pas devant cette action ignoble.»

«Nous sommes en train de déployer les magistrats dans tous les coins de la République, notamment à Bukama, où nous avons envoyé une équipe de magistrats. La lutte ne va pas se faire seulement par le parquet, elle doit se faire par tous les services de l’Etat, notamment la police et les autres services sociaux… », a encore expliqué le magistrat Safari Kasongo.

Autre réaction, c’est celle de l’Intersyndicale des magistrats du Congo.

Dans une déclaration faite mardi à la presse par rapport à l’incident de Bukama, cette structure exprime sa sympathie envers le magistrat agressé dans l’exercice de ses fonctions.

Elle a toutefois en même temps évoqué les difficultés de compréhension et d’application de la loi sur les violences sexuelles.

René Sibu, président de l’Intersyndicale des magistrats s’est exprimé à ce sujet:

«Nous devons condamner pareille attitude, et surtout d’après nos informations, il y a eu une certaine passivité des forces de l’ordre et de l’autorité administrative pour ne pas assister le collègue. Ses chefs sont au courant, nous sommes certains qu’ils vont ouvrir une action judiciaire pour que toutes les responsabilités soient établies. Mais c’est aussi l’occasion d’encourager les magistrats et tous ceux qui ont en charge l’application de la loi de continuer à œuvrer pour, d’une part, selon les compétences, expliquer à la population la nouvelle loi, parce qu’elle est difficile. Il y a des mentalités qu’il faut vraiment changer, surtout dans les coins reculés. Je dois vous dire aussi que ce sont des textes assez difficiles à appliquer, il y a des choses à redire dans cette loi. Juger, c’est notre beau métier, mais nous jugeons des hommes, il faut que nous ayons des lois qui soient applicables à nos sociétés.»