RDC : le Conseil supérieur de l’audiovisuel brouille le signal de Radio Okapi sur Kinshasa

De gauche à droite, le vice président du Csac, Alain Nkoy et le président du Csac, Abbé Jean Bosco Bahala Okw’ Ibale, lors d’une conférence de presse le 28/09/2011 à Kinshasa. Radio Okapi/ Ph. John Bompengo

Le signal de Radio Okapi a été brouillé à Kinshasa depuis le samedi 1er décembre dans l’après-midi, sur décision du Conseil supérieur de l’audiovisuel congolais (CSAC), organe de régulation de la presse en RDC. La station n’a reçu aucune notification de cette décision. Selon un communiqué de l’Association congolaise pour l’accès à la justice (Acaj), qui cite une note technique lue à la télévision publique, le CSAC reproche Radio Okapi «d’avoir diffusé le vendredi 23 novembre à deux heures du matin, au cours de l’émission Parole aux auditeurs, des interventions comportant le non respect de l’autorité  et des institutions établies, le manque de retenue, l’appel à l’insurrection et le parti pris ».

Interrogé par RFI, le président du CSAC, Jean Bosco Bahala, a indiqué que la Radio Okapi a été suspendue pour des raisons administratives et non à cause de l’interview accordée le jeudi dernier par la chaîne au chef politique du M23, Jean-Marie Runiga.

« Nous leur avons demandé de ne pas accorder la parole aux rebelles du M23 qui sont considérés comme des terroristes. Mais là n’est pas le problème. Pour nous, le problème est d’abord administratif. S’ils amènent leur cahier de charge, nous allons rouvrir la radio », a-t-il expliqué.

A en croire RFI, le patron du CSAC a mis en garde la Radio Okapi qui est sommée « de régulariser sa situation d’ici mardi sinon elle s’exposera à de nouvelles sanctions ».

Dans un communiqué publié ce dimanche 2 décembre, la Mission des Nations unies en RDC a exprimé « sa déception » suite à la décision du CSAC.

« La décision est particulièrement mal venue eu égard à la situation délicate et difficile qui prévaut au Nord- Kivu », a indiqué le Chef de la Monusco, Roger Meece.

« Radio Okapi diffuse des informations cruciales pour la population telles que des appels au calme par les leaders religieux, les communiqués relatifs à l’instauration du couvre-feu par les autorités provinciales et bien d’autres encore. Je trouve le choix du moment pour cette décision et l’absence de notification troublants et regrettables », a-t-il ajouté.

Le communiqué révèle que la décision de suspension n’a jamais été notifiée ni à Radio Okapi ni à la Monusco.

Mais selon un document du CSAC dont la mission onusienne a réussi à obtenir une copie, le CSAC justifie sa décision par le refus de Radio Okapi de lui soumettre sa grille de programmes.

« Considérant la gravité de la situation sécuritaire à Goma, souligne le communique de la Monusco, le Représentant spécial du secrétaire général des Nations unies a pris la décision d’autoriser l’utilisation des voies alternatives afin de permettre, même de façon intermittente, la poursuite de la diffusion des programmes de Radio Okapi dans le Nord-Kivu ».

Le porte-parole de la Monusco, Madnodje Mounoubai, s’est dit surpris par la décision du CSAC, indiquant que cette décision est mal venue au regard des événements dans l’Est de la RDC marqués par la rébellion du M23 qui, après avoir occupé la ville de Goma une dizaine de jours, en est sorti le samedi.

« La population compte beaucoup sur Radio Okapi pour s’informer. Depuis l’entrée du M23 dans la ville de Goma, les signaux des toutes les radios ont été coupés à l’exception de la RTNC et de la Radio Okapi. La RTNC, étant devenue la voie de propagande du M23, la population n’a pas l’occasion d’avoir d’autre son de cloche si ce n’est par Radio Okapi. Et si Radio Okapi devait aussi devenir muette, ça veut dire que nous abandonnons la population du Nord-Kivu dans le noir en ce qui concerne l’accès à l’information », a-t-il expliqué.

Ecouter les explications du porte-parole de la Monusco.

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La Radio Okapi est un média des Nations unies en partenariat avec la Fondation Hirondelle. Elle émet en RDC depuis 2002.

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