L’éclatement du M23 redessine le conflit qui oppose depuis plusieurs mois la rébellion et le gouvernement congolais à l’Est de la République démocratique du Congo. L’affaiblissement du mouvement rebelle remet en selle le président Kabila qui pourrait se sortir momentanément du conflit en signant la fin des hostilités avec le camp de Sultani Makenga.
Après la scission de la rébellion du M23, la guerre au Nord-Kivu entre dans une nouvelle phase. Le mouvement rebelle est désormais divisé en deux clans bien distincts: les pro-Makenga, le commandant militaire du M23 et les pro-Ntaganda, ralliés par l’ancien responsable politique de la rébellion, Jean-Marie Runiga. Makenga a destitué Runiga de son poste de président et les deux camps rivaux se sont affrontés la semaine dernière à Rutshuru, une localité sous contrôle rebelles. Les partisans de Makenga ont poursuivi Runiga et Ntaganda jusqu’aux portes du parc des Virunga et se sont fixés à Tchanzu.
Une mosaïque de groupes armés
Plusieurs leçons sont à retirer de la guerre interne qui fait rage au M23. Sur le terrain militaire tout d’abord. En se retirant de Rutshuru pour se battre, les rebelles ont laissé “libre” cette localité qu’ils contrôlaient depuis plus de 8 mois. Et surprise, ce ne sont pas les FARDC (l’armée régulière congolaise) qui viennent reprendre la ville, mais les FDLR, une milice rwandaise composée de rebelles hutus et des groupes armés Maï-Maï. L’armée congolaise prendra ensuite le relais, mais tardivement, réactivant les nombreuses rumeurs de “collaboration” entre les milices FDLR et les troupes de Kinshasa. Un “partenariat” de bien mauvaise augure pour la future force d’intervention rapide de l’ONU, chargée de venir à bout du M23, mais aussi des FDLR et des groupes Maï-Maï, utilisés régulièrement par les autorités congolaises comme milices supplétives. Un mélange des genres qui sera bien difficile à démêler pour les soldats de la paix.
Risque de “somalisation” du conflit
Deuxième leçon : l’éclatement du M23 a ouvert les vannes de la violence pour tous les autres groupes armés du Nord-Kivu, et ils sont… une petite vingtaine ! L’APCLS (Alliance des patriotes pour un Congo libre et souverain) s’est férocement battu à Kitchanga contre l’armée régulière. Les groupes Maï-Maï Nyatura et Shetani se sont également disputés la vile de Kiwanja. En désertant certaines villes qu’elle contrôlait, la rébellion du M23 a donc laissé la place aux autres groupes armés de la région. Certains analystes craignent un “morcellement” du conflit par des dizaines de milices. Une “somalisation” du Kivu qui serait extrêmement difficile d’enrayer, comme le soulignait Kris Berwouts au micro de Sonia Rolley, sur RFI ce week-end.
Makenga se rapproche de Kinsahsa
Troisième leçon : la stratégie du M23 a considérablement évolué. Car, si le conflit entre Sultani Makenga et Bosco Ntaganda remonte à 2009, avec l’arrestation du leader de la rébellion de l’époque, Laurent Nkunda, les divergences ont maintenant éclaté au grand jour. Sultani Makenga pense en effet qu’il est possible de renégocier les accords du 23 mars avec le gouvernement congolais au profit du M23. Il le pense et il le souhaite. Makenga estime que la stratégie du M23 pour “déstabiliser” le régime de Joseph Kabila ne peut s’opérer d’un seul coup. Il faut progresser “par étape“, : accords après accords, batailles après batailles. Lire la suite sur courrierinternational.com