Belgique-RDC : Didier Claes, l’art et le bagou-Jeune Afrique

Congolais par sa mère, belge par son père, Didier Claes est un marchand avisé vend sans complexe des objets cultuels africains à de riches collectionneurs.

L’élégance est soignée, le sourire millimétré et le verbe profus. Didier Claes, marchand d’art, parle comme pour occuper le terrain, et l’interrompre sans paraître malpoli exige de déployer tout un trésor de ruses. Qu’il ait réussi dans le commerce des oeuvres africaines anciennes ne saurait surprendre : ses clients, sans doute, achètent aussi les histoires qu’il leur raconte, comme un emballage cadeau paré des mystères de la brousse. Lui-même sait dire sa propre légende avec talent. « Mon père travaillait pour l’Institut des musées nationaux du Zaïre, raconte-t-il. Il n’avait pas le droit de vendre des pièces, mais il allait en brousse et le faisait quand même, avec l’accord tacite des autorités. C’était quelqu’un de dur, qui aimait l’argent. Il ne m’a jamais rien montré, je me suis imprégné par moi-même. À l’âge de 13 ans, lors de vacances à Bruxelles, j’ai vendu trois coiffes de Centrafrique pour 20 000 francs belges chacune au marchand Philippe Guimiot. Avec l’argent, j’ai racheté des coiffes au Congo. »

Né à Kinshasa, de mère zaïroise et de père belge, Didier Claes a vécu au Congo jusqu’à ses 16 ans, quatrième enfant du côté maternel, aîné du côté paternel. « Aujourd’hui, je suis l’un des seuls marchands métis au monde. Mais quand on est métis en Afrique, ce n’est pas si facile. N’étant ni noir ni blanc, beaucoup de métis se retrouvent entre eux. » Vivant dans le quartier de Limete, à Kinshasa, Claes navigue entre l’école belge – ghetto de riches où il n’est pas trop dans son élément – et la cité où il est « mieux accepté par des gens simples ». Son éducation, dit-il, lui permet de passer facilement d’un milieu à l’autre.

En 1991, c’est d’un pays à l’autre qu’il faut passer, la guerre au Congo chassant les Claes vers la Belgique. Le racisme n’influe guère sur le jeune homme : « Je me suis rendu compte qu’il y avait des personnes avec qui il n’était pas nécessaire de parler. » En revanche, ses résultats scolaires suivent une mauvaise pente, et ses relations avec son père en pâtissent. « Il a mal vécu la transition, le fait que les objets se tarissent. J’ai vécu avec les anecdotes de ces vieux baroudeurs qui sortaient les objets par malles entières… » Invité par sa mère à débarrasser la cave des oeuvres y moisissant, Claes les écoule aux puces. Marié très jeune, il a besoin d’argent. Lire la suite sur jeuneafrique.com