Hillary Clinton accorde une interview exclusive à radiookapi.net

Hillary Clinton après l'interview avec Jaldeep Katwala et Jean Claude Ntumba

Hillary Clinton après l'interview avec Jaldeep Katwala et Jean Claude Ntumba

La secrétaire d’Etat américaine, à travers une interview exclusive accordée lundi à radiookapi.net, demande au gouvernement congolais de s’assurer qu’aucun militaire de la RDC n’est impliqué dans les violences sexuelles. Et de punir les auteurs de ces violences. Radiookapi.net publie ici l’intégralité de cette interview.

Radiookapi.net: Comment, d’après vous, le problème des violences sexuelles peut être résolu en RDC dans la perspective des opérations militaires en cours qui font croire à certaines ONG que la situation est en train de s’empirer?

Hillary Clinton : Il ne fait aucun doute que le conflit en cours empire le la situation. Malheureusement, nous assistons en ce début du 21e siècle, à un drame horrible, celui d’utiliser les violences sexuelles comme une arme de guerre pour intimider et démoraliser les populations et les forcer à fuir leurs milieux. Je pense que ceci exige des efforts concertés de la part du gouvernement congolais et des autres gouvernements de la région qui s’intéressent à la situation en RDC. Les ONG et la société civile doivent également être associées aux efforts visant à combattre les exactions militaires et les violences sexuelles commises par les hommes armés. Ensuite, il faut lutter contre l’ impunité sous toutes ses formes. Il faut également couper toutes les sources de financement aux milices qui écument la région et résoudre les tensions politiques sous-jacentes à l’Est de la RDC. A l’instar de plusieurs autres pays, la RDC doit se doter d’un arsenal juridique adéquat pour lutter contre les violences sexuelles, notamment les viols et d’autres actes de criminalité qui se commettent dans les rues de Kinshasa ou dans d’autres villes du pays. Il faut envisager enfin des poursuites judiciaires contre les auteurs des violences et les punir conformément à la loi en la matière. Car, ce sont des actes inadmissibles et il n’y a pas d’excuses pour quiconque qui s’y livre. C’est ce que j’attends du gouvernement.

Radiookapi.net : Qu’est-ce que le gouvernement des Etats-Unis peut faire concrètement pour aider le gouvernement à résoudre ce problème?

Hillary Clinton : Eh bien, nous essayons de faire plusieurs choses à la fois. D’une part, nous travaillons bien évidemment avec les Nations Unies et nous sommes les plus grands contributeurs à la force de maintien de la paix à l’Est de la RDC. D’autre part, il y a un rapport selon lequel les problèmes qui ont prévalu antérieurement en termes de violences sexuelles parmi les troupes de l’Onu ont été résolus. Nous sommes en train de travailler avec le gouvernement du président Kabila et les militaires congolais, afin d’aider ces derniers à s’imprégner des notions de droits de l’homme et du respect des droits de la femme. Et naturellement, nous sommes en train de fournir des services de soins de santé à ces femmes, victimes des violences sexuelles.

Radiookapi.net: Et en termes de performance du gouvernement congolais sur les droits de l’homme, quelle est votre évaluation ?

Hillary Clinton : Le gouvernement congolais a tout intérêt à améliorer sa performance. Il sort, bien sûr, de plusieurs années de guerre et cela est un facteur très déstabilisant pour la population. Très souvent, les droits de l’homme sont considérés comme un luxe en temps de guerre. Mais, il n’y a plus d’excuses et on doit attendre davantage d’efforts du gouvernement congolais, des Etats-Unis, des autres pays ainsi que des Nations Unies. Il faut donc aider le gouvernement à engager ces reformes pour, à la fois promouvoir les droits de l’homme et punir les auteurs des violations des droits de l’homme et des droits de la femme. Mais, je crois qu’il faut, de la part du gouvernement congolais, mener des actions et affirmer plus d’engagement pour le respect de ces droits.

Radiookapi.net: Lorsque les gens regardent ce pays, la RDC, ils se rendent compte des efforts des Chinois. Les routes, des hôpitaux sont en train de se construire. Concrètement, que peut être la contribution des Etats-Unis dans le processus de reconstruction de la RDC? Que peut faire l’administration américaine pour accompagner cet effort de reconstruction?

Hillary Clinton : Eh bien, c’est intéressant parce que je suis au courant de l’engagement pris par la Chine et je pense que la construction des routes est un objectif de développement très important pour ce pays. Mais, la bonne gouvernance l’est aussi, tout comme la protection des droits de l’homme ou l’édification d’un système judiciaire indépendant, d’une presse libre, des institutions démocratiques qui tiennent longtemps. Il est important d’introduire le libre marché, de lutter contre la corruption, d’exiger plus de transparence. Et les États-Unis travaillent pour atteindre ces objectifs-là. Je suis consciente que parfois les gens voient les routes plus qu’ils ne considèrent la protection des droits de l’homme. Mais, vous pouvez avoir un pays doté de routes, qui prive toujours sa population de ses libertés fondamentales, qui bafouent les droits de l’homme, qui n’a pas de développement économique, de sorte qu’il n’y ait ni biens ni services qui circulent sur ces routes et qui aident effectivement les populations. Ainsi, je pense que cela doit être un effort global. Je crois qu’avec notre aide en matière de santé et d’éducation, les Etats-Unis sont en train de jouer un rôle très important. Et nous devons déterminer ce que nous pouvons faire d’autre.