Les Nations Unies, l’Union européenne et les Pays-Bas ont organisé ce vendredi à Genève une conférence des donateurs pour la République démocratique du Congo (RDC) où au moins 13 millions de personnes, dont un tiers de déplacés internes, ont besoin d’une assistance humanitaire d’urgence cette année.
« La République démocratique du Congo fait face à l’une des plus grandes crises humanitaires au monde », a rappelé le secrétaire général des Nations Unies António Guterres, dans un message vidéo diffusé à l’ouverture de la conférence.
Dans la ville suisse, l’ONU a demandé 2,2 milliards de dollars aux donateurs pour répondre à la crise humanitaire en RDC. Un montant qui comprend 1,7 milliards de dollars pour financer le Plan d’intervention humanitaire à l’intérieur de la RDC ainsi que plus de 504 millions de dollars pour soutenir les 807.000 congolais réfugiés dans les pays voisins et subvenir aux besoins des plus de 540.000 réfugiés d’autres pays actuellement sur le territoire congolais.
« C’est beaucoup d’argent. Mais cela représente moins de 50 centimes par jour pour chacune des personnes dont nous essayons de sauver et de protéger la vie », a déclaré Mark Lowcock, le chef du Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA) lors de la conférence organisée au Palais des Nations.
En RDC, « les besoins humanitaires augmentent », a mis en garde Mark Lowcock rappelant que la crise actuelle a ses racines dans les conflits ethniques, politiques et économiques. Selon le Chef d’OCHA, les violences ethniques se sont aggravées dans l’est de la RDC alors que certaines parties du pays jusqu’ici épargnées par les conflits armés et les catastrophes, ont connu des niveaux élevés de violence au cours de l’année écoulée.
« La transition politique crée des tensions », a ajouté le chef de l’humanitaire de l’ONU, tout en indiquant que des chocs externes ont fragilisé l’économie congolaise, « avec une baisse vertigineuse du prix des matières premières affectant la devise et alimentant une spirale inflationniste et les pressions sur les dépenses publiques, qui sont autant de difficultés pour les populations dans tout le pays ».
En l’espace d’un an, le nombre de personnes ayant besoin d’assistance en RDC a presque doublé, passant de 7,3 millions à 13,1 millions. Quelque 7,7 millions de personnes souffrent d’insécurité alimentaire. Au total, la malnutrition aiguë sévère menace la vie de 2,2 millions d’enfants et plus de 4,6 millions d’enfants souffrent de malnutrition aiguë. Le chef d’OCHA a rappelé que dans les Kasaï, des milliers d’agriculteurs ont raté trois saisons agricoles successives, entraînant une baisse de la production agricole.
« Au moment où je vous parle, la résurgence d’un conflit interethnique en Ituri en février tue de nombreuses personnes et conduit de plus en plus à des déplacements internes et transfrontaliers », a fait remarquer Mark Lowcock, ajoutant que la RDC est également confrontée à des épidémies, y compris la pire crise de choléra en 15 ans. « Malheureusement, il y a aussi une épidémie de violence sexuelle, la plupart non déclarée et non traitée, et une grande partie contre les enfants », a-t-il déclaré.
« C’est l’insécurité qui doit être réglé pour que les gens puissent rentrer chez eux »
De retour d’une visite en RDC, le Haut-Commissaire des Nations unies pour les réfugiés, Filippo Grandi, a mis l’accent sur l’interdépendance des crises dont souffre la région des Grands Lacs depuis plus d’un quart de siècle. Une façon pour le chef du HCR de souligner la nécessité d’une volonté renouvelée de recherche de solutions durables. « On va parler beaucoup d’humanitaire. C’est bien, c’est urgent et c’est nécessaire, mais tout cela est lié à la résolution des conflits politiques », a fait remarquer M. Grandi.
Pour le Haut-Commissaire, il faut travailler plus et mieux vers des solutions à ces situations du déplacement, notamment pour les réfugiés et les déplacés internes. « C’est une question que j’ai soulevée lors des rencontres que j’ai eues la semaine dernière avec les chefs d’Etat de la RDC, du Rwanda et du Burundi », a dit M. Grandi. « Aux Présidents Kabila, Nkurunziza et Kagamé, je leur ai dit ce que me disent tous les réfugiés et les déplacés à l’unanimité, c’est l’insécurité qui doit être réglé pour que les gens puissent rentrer chez eux ».
L’autre axe exploré par l’agence onusienne consiste à augmenter les ressources allouées à la réintégration des personnes dans leurs communautés quand ces dernières décident de rentrer chez elles. « Et troisièmement, il faut que les Etats de la région travaillent plus et mieux ensemble pour trouver une solution à ces phénomènes », a souligné le chef du HCR.
Malgré la détérioration de la situation humanitaire, l’ONU reconnaît toutefois que des progrès sont possibles en RDC. Au cours des 15 dernières années, sous la direction du gouvernement, les infrastructures dans de nombreuses grandes villes du pays se sont améliorées, l’accès à l’éducation a été amélioré, le taux de mortalité infantile a baissé et les taux de vaccination ont augmenté.
« Le gouvernement de la République démocratique du Congo assure le leadership sur cette crise », a souligné Mark Lowcock qui a également salué l’engagement de Kinshasa à fournir sur ses propres ressources près de 100 millions de dollars. Au cours des deux prochaines années, ces fonds permettront de faciliter la réintégration des réfugiés congolais, des rapatriés et des personnes déplacées internes.
« Nous continuerons à travailler en étroite collaboration avec le gouvernement. Nous discutons avec eux du suivi de la conférence d’aujourd’hui et cette discussion aura lieu à un moment donné et à un endroit convenant au gouvernement », a conclu le chef de l’humanitaire de l’ONU.
Avec ONU Info.