Robert Nouzaret: «Le manque de possibilité de faire la meilleure équipe chaque fois, c’est le plus frustrant.»


Robert Nouzaret regrette l'absence de la Fecofa et du ministère de tutelle au match Mali-RDC. (Photo Radio Okapi), Kinshasa 1er août.

Dans une interview exclusive à Radio Okapi, dimanche 21 novembre, le sélectionneur de l’équipe nationale de football de la RDC, Robert Nouzaret, s’est expliqué sur la débâcle du onze national face au Mali en match amical. Il a parlé également de difficultés auxquelles est confrontée la sélection congolaise, les enjeux à venir, son programme de travail, etc.   

Radio Okapi: Vous êtes le patron du staff technique des Léopards football de la RDC. Mercredi, cette équipe a perdu un match amical face au Mali sur le score d’un but contre trois. Qu’est-ce qu’on peut retenir de cette rencontre?

Robert Nouzaret: Contrairement au score, je retiens des aspects énormément  positifs. D’abord, en fonction de l’équipe que j’ai alignée, toujours dans les mêmes conditions depuis que je suis à la tête de la RDC. Que ce soit face à l’Egypte, au Sénégal, au Cameroun  et maintenant face au Mali, j’ai une très grande frustration quant aux possibilités de ne pas faire la meilleure équipe chaque fois, pour tant de raisons dont je parlerai plus tard. Mais en ce qui concerne le comportement de l’équipe faite de bric et de broc, puisqu’il nous a manqué, sur les 24 joueurs convoqués, plus de dix joueurs pour des raisons diverses: soit à cause des blessures, soit à cause des convocations arrivées en retard, soit à cause des visas non obtenus, soit des joueurs qui ne veulent pas venir. Nous avons fait une équipe très jeune et qui a joué pour la première fois contre le Mali ensemble. Et on a assisté à une première mi-temps de très bonne facture, où on a mené un à zéro. En deuxième mi-temps, j’ai été obligé  de changer deux défenseurs, dont un n’avait pas l’habitude de jouer arrière mais que j’étais obligé de placer là parce que je n’avais pas d’autre solution. Mais, malheureusement, les trois buts maliens sont arrivés de ce coté là; parce que physiquement l’équipe a un peu lâché au milieu et on était moins performant sur le plan athlétique. Et le Mali en a profité. Après, on est revenu dans le match et on s’est créé  quatre occasions nettes. Mais, malheureusement, on n’a pas été réaliste  et efficace soit par maladresse soit à cause du gardien adverse. Cependant, dans le contenu du match, c’était positif, mais après on a perdu ça, c’est un autre problème. Il y a toujours des raisons à la défaite: la valeur de l’adversaire, le manque d’efficacité de l’équipe, le manque de réalisme défensif mais surtout le manque de possibilité de faire la meilleure équipe chaque fois et ça c’est le plus frustrant.

RO: Difficile dans ces conditions de faire son travail normalement…

RN: C’est évident! D’abord, je suis arrivé en retard. Ce qui m’a beaucoup gêné dans la connaissance des joueurs. Jouer un match amical contre l’Egypte, qui est le triple champion d’Afrique dans les conditions dans lesquelles on a joué, c’était scandaleux. Après avoir attaqué les matchs de qualification contre le Sénégal, qui a fait un appel au peuple concernant tous ses joueurs, après avoir joué contre le Cameroun qu’on ne présente plus, c’est difficile. Et après le Mali… tout ça fait qu’on vient de rencontrer quatre équipes de haut niveau sans avoir la possibilité de rivaliser à arme égale. C’est ce qui est le plus gênant. Car, je suis persuadé que si on faisait tout pour réunir les meilleurs joueurs évoluant en Europe et les meilleurs locaux, on pourrait faire une équipe du niveau de vingt-cinq meilleures d’Afrique. Malheureusement, beaucoup de choses manquent pour en arriver là.

RO: Est-ce que vous croyez, M. Nouzaret, que les choses peuvent changer d’ici à la troisième journée des éliminatoires?

RN: En tout cas, c’est mon objectif quelque soit la manière que je m’emploierai. Je ferai tout vis-à-vis de la fédération et du ministère des Sports pour faire bien entrer dans la tête des responsables que, s’il n’y a pas un changement d’attitude à tous les niveaux, ce sera difficile. Vous savez, on a convoqué 60 joueurs pour faire une réunion afin de tout mettre sur la table, il y a eu 21 joueurs qui sont venus. Le président de la Fecofa n’est pas venu, le ministre non plus. Déjà, ça c’était une erreur tactique. Mais les 21 joueurs qui étaient là se sont exprimés et je pense que le dirigeant, Théo Binamengu qui était avec nous fera le rapport à son président pour lui exprimer les doléances des joueurs qui tournent toujours autour des mêmes choses: logistique à améliorer, confort à améliorer, problème de remboursement des billets, tout faire pour faire la meilleure équipe, faire venir les  meilleurs joueurs. Je regardais tous les meilleurs joueurs qui évoluent en France, en Belgique et en Angleterre, l’équipe qu’on peut faire, ça fait rêver! C’est un gaspillage monstre qui est dû à quelque chose qui se passe depuis 2006, date où la RDC  a fait sa dernière CAN et par la suite le pays s’est retrouvé à la 130ème place au classement Fifa. Ce qui est indigne par rapport à la puissance et aux aspects économiques que représente la RDC et par rapport à la qualité des tous ses joueurs qui évoluent en Europe et au pays. Les titres de Mazembe et de l’équipe locale sont des choses très positives, mais qui n’ont pas été utilisées dans ce sens-là. La grosse erreur que tout le monde fait est de croire que ces titres africains permettent de penser que les locaux sont meilleurs que les professionnels. Au lieu d’opposer les uns aux autres, ce serait mieux de tout faire pour les réunir. Il faut prendre les meilleurs locaux et les meilleurs professionnels pour faire une équipe qui, non seulement va avoir la possibilité de gagner une CAN un jour, mais aussi se qualifier pour une coupe du monde. Et c’est ça que tout le monde doit rechercher et toutes les instances doivent s’inspirer.

RO: Est-ce que vous êtes satisfait de la décision du joueur Mununga, qui évolue au championnat de Belgique, de jouer pour la RDC?

RN: Bien sûr et c’est une des conséquences positives de la réunion qu’on a eue. Et je pense qu’il y en aura d’autre et je dirai même qu’il faudra provoquer une seconde réunion en février pour bien dire à tous ceux qui sont venus de revenir et à tous ceux qui ne sont pas venus de venir, en espérant que, ce jour-là, le ministre des sports et le président de la Fecofa seront là. Je crois qu’il faut qu’à un moment donné admettre d’entendre des choses négatives pour s’améliorer. Si on ne veut qu’entendre des choses positives, qui sont plus ou moins réelles, on se masque de la réalité et on s’éloigne des toutes nos possibilités. Et moi, je suis là pour ça. Je ne suis pas là pour mettre la pommade à tout le monde. Je suis prêt à dire des choses qui existent et qui soient négatives ou positives pour arriver à être compétitif.

RO: C’est quoi le prochain programme des Léopards et de Robert Nouzaret?

RN: En décembre 2010 et en janvier 2011, il n’y a pas de date fifa. Il faut attendre le mois de février, où nous allons trouver un bon match amical en France ou en Belgique ou ailleurs pour préparer les matchs du mois de mars. Mais, malheureusement nous ne pourrons pas utiliser les meilleurs locaux puisqu’à cette date-là, les joueurs de Mazembe auront terminé leur coupe du monde et seront entrain de préparer le CHAN. On se retrouvera encore une fois avec essentiellement les professionnels. J’espère qu’en trois mois je vais un peu circuler en Europe pour essayer de convaincre les joueurs de venir. Je pense qu’il y a un joueur qui est venu, Christophe Mulunga, qui va avoir une influence prépondérante pour l’avenir de l’équipe. Lui, il a compris certaines choses et il va certainement influencer d’autres joueurs pour faire vraiment ce que chaque joueur doit faire. C’est-à-dire faire l’effort de venir pour rendre à la RDC une équipe très compétitive, qui corresponde à la valeur des tous les joueurs qui évoluent au monde.

RO: Vous parlez d’une tournée européenne. Est-ce qu’il y a une tournée sur le plan local au programme?

RN: La tournée au plan local n’est pas possible. Tous les meilleurs joueurs évoluant au pays vont être réunis pour le CHAN. Les meilleurs de Mazembe, je les connais. Les meilleurs de V.club je les connais aussi; ceux de deux ou trois autres clubs, aussi.  Ils vont être rassemblés dans des stages pour préparer ce championnat. Ils ne seront pas au pays.