30 juin 2017 : la RDC célèbre son 57e anniversaire d’indépendance sur fond des tensions

La République démocratique du Congo (RDC) fête ce vendredi 30 juin 2017 le 57eme  anniversaire de son accession à l’indépendance sur fond des tensions à caractère politique et sécuritaire. 

La célébration de cet évènement intervient en effet au moment où le pays traverse une crise de légitimité institutionnelle : toutes les institutions à mandat électif sont hors mandat, alors que l’incertitude demeure sur la tenue des élections à la fin de l’année, comme indiqué dans l’accord politique du 31 décembre 2016.

La RDC commémore également ce 57e anniversaire d’indépendance sur fond des violences. Le pays est secoué par des violences notamment dans le Kasaï et dans le territoire de Beni. Des miliciens et les forces de l’ordre sont accusés de graves violations des droits de l’homme.

Cinquante-sept ans après l’accession de la République démocratique du Congo (RDC) à son indépendance, le pays est en train de chavirer, a regretté jeudi 29 juin le président du Conseil des confessions religieuses en Afrique de Beni (Nord-Kivu), le bishop Janvier Baraka.

Mais l’indépendance de la RDC, c’est aussi une page d’histoire que nous nous proposons de vous rappeler brièvement dans les lignes qui suivent.

Le vent de l’indépendance souffle sur l’Afrique

Au lendemain de la seconde guerre mondiale, les mouvements indépendantistes commencent à se structurer en Afrique. Les protestations contre le système colonial vont croissant, surtout en Afrique du Nord qui s’empare très tôt de cette revendication. Le sujet devient d’une brûlante actualité.

Dans la foulée, les anciennes métropoles accordent progressivement l’indépendance à leurs colonies : l’Italie à la Libye (en 1951), la Grande Bretagne à l’Egypte (en 1953), la France au Maroc et la Tunisie (en 1956).

Sentant venir ce vent, Joseph van Bilsen, commissaire du roi des Belges à la Coopération au développement publie en 1955 une étude intitulée « Plan de 30 ans pour l'émancipation politique de l'Afrique belge ». Il propose donc un plan de 30 ans pour l’émancipation du Congo Belge et du Rwanda-Burundi, les deux colonies belges d’Afrique centrale.

Selon le plan Bilsen, l’indépendance du Congo Belge devrait être progressive, et commencer  par la formation des élites locales à la gouvernance au niveau des villes et des localités pour ensuite accorder l’émancipation à des entités territoriales dont les élites se seraient distinguées par un certain niveau de maturité dans la gestion des affaires publiques, explique Thomas Luhaka, actuel ministre des infrastructures, Travaux publics et Reconstruction, grand passionné de l’histoire de la RDC, au cours de l’émission « Je connais le Congo » qui retrace l’histoire du Congo Belge. 

 Ce plan fera réagir. D’abord l’administration coloniale belge qui accusera Van Bilsen de trahison. Ensuite deux organisations des autochtones : la Conscience Africaine et l’Alliance des Bakongo.

Le manifeste de la Conscience Africaine, première déclaration politique des Congolais

Dans la première ligne, la Conscience Africaine, une association des jeunes évolués congolais  créée par un prêtre diocésain, l’Abbé Joseph Malula. Ce groupe composé notamment de Joseph Ileo, Albert Nkulu, Dominique Zangadie, Antoine Ngonza et Victor Djoli publiera en 1956 en réaction au plan de 30 ans de Van Bilsen un article intitulé « Manifeste » dans le  bimensuel « la Conscience Africaine » qu’ils avaient créé.
Dans cet article, la Conscience Africaine demande notamment  à l’administration coloniale d’adhérer au plan de 30 ans de Van Bilsen pour une indépendance progressive et d’être associé à la rédaction de ce plan. 
«Les membres de la Conscience Africaine ignoraient encore que ce plan était déjà rédigé», explique Thomas Luhaka.

La déclaration des évêques du Congo

Dans la foulée, les évêques catholiques, la plupart blancs, entrent dans la danse. Le 29 juin 1956, ils sortiront une déclaration dans laquelle ils soutiennent que « l’émancipation d’un peuple est un droit légitime» et affirment que « chaque peuple a le droit d’être émancipé ».
Ils condamnent également le racisme sous toutes ses formes. Pour lier la parole à l’acte, ils sacrent successivement Pierre Kimbondo, Kongolo et Joseph Malula, trois abbés d’origine congolaise, évêques. 

La Déclaration de l’Abako

Les deux précédentes déclarations feront finalement réagir, l’Alliance des Ba Kongo, une association des évolués d’origine Kongo qui revendiquaient le leadership dans Léopoldville (Actuelle Kinshasa). Au terme d’une assemblée générale extraordinaire convoquée le 16 juillet 1956 pour la circonstance, le leader de l’Abako Joseph Kasa-Vubu, au nom de l’association, rejette totalement le plan de 30 ans de Van Bilsen et réclame l’émancipation immédiate.

 Le 4 janvier 1959, le déclic

Le 4 janvier 1959, des émeutes éclatent à Léopoldville après que les autorités coloniales ont interdit aux membres du parti politique Abako (Alliance des Bakongo) de manifester. Cette révolte populaire va durer trois jours. La répression est très violente. Le bilan officiel est de quarante-neuf morts. Mais d'autres sources, notamment celles de l'Abako parlent des centaines de morts.
« L’implication majeure de cette révolte est l’obtention de l’indépendance le 30 juin 1960 », affirme le père Léon de Saint Moulin. Les événements de janvier 1959 accélèreront l’accession à l’indépendance.
« C’est un jour qui marque une étape décisive dans la conquête de l’indépendance. Le pouvoir colonial a dû prendre conscience que l’indépendance était une aspiration profonde et les gens l’ont manifesté. Officiellement on parle de 49 morts mais on dit qu’il y en a eu 100 et peut-être 300. L’administration a été affolée quand elle a vu le lendemain, le nombre de morts », note l’historien belge qui s’est installé en RDC depuis août 1959.

Lire aussi: 4 janvier 1959: le déclic de la conquête de l’indépendance

La Table Ronde et l’obtention de l’indépendance

Ces mouvements de résistance aboutissent à l’organisation de la table ronde de Bruxelles du 20 janvier au 21 février 1960. Ce forum regroupe dans la capitale belge l’élite congolaise, les chefs coutumiers de l’époque et le gouvernement belge.

Au début des travaux, deux options contradictoires émergent. Le ministre belge des colonies tient à ce que la table ronde définisse les structures politiques, analyse les problèmes politiques qui se posent dans la colonie et mette sur pied un calendrier d’exécution. La majorité de l’élite congolaise estime qu’il faut d’abord fixer la date de l’indépendance.

Sur ce point, les Congolais avancent la date du 1er juin 1960. Les Belges proposent d’abord le 15 juillet 1960. Finalement, la poire est coupée en deux: la date du 30 juin est retenue par toutes les parties. Jean Bolikango, l’un des pères de l’indépendance, annonce le 27 janvier 1960 à Bruxelles que l’indépendance du Congo sera proclamée le 30 juin 1960.

Les premières élections législatives nationales ont lieu du 11 au 25 mai 1960. Elles mettent en compétition les candidats des 40 partis politiques, précise Pamphile Mabiala dans son livre « Les élections dans l’histoire politique de la RDC de 1957 à 2011 » publié a Kinshasa aux éditions Mediaspaul.

Au terme de ces élections, le MNC de Patrice Emery Lumumba et ses alliés sortent vainqueur et Lumumba est désigné Premier ministre.

De son côté, Joseph Kasa-Vubu est largement élu au suffrage indirect par le premier Parlement congolais comme le premier président de la jeune République du Congo face à Bolikango.

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