Meurtre des experts de l’ONU au Kasaï: les deux principaux accusés confrontés à un témoin qui les met en cause


L’audience de jeudi du procès du meurtre des experts de l’ONU au Kasaï a été marquée par la confrontation entre le témoin Jean Bosco Mukanda et les prévenus Bula Bula et Vincent Manga qu’il accuse d’avoir participé au meurtre de Zaida Catalan et Michael Sharp en mars 2017 au village Moyo Musuila.

C’est la première fois que les prévenus Bula Bula et Vincent Manga- qui ne comparaissent que depuis la reprise du procès le lundi dernier- sont confrontés au témoin Jean Bosco Mukanda. Ce dernier est le principal renseignant dans cette affaire depuis le début du procès.

Alors que Bula Bula et Vincent Manga rejettent tout lien avec le meurtre des experts de l’ONU, Jean-Bosco Mukanda les met en cause.
Cet enseignant qui affirme également avoir été informateur pour les services de renseignement congolais au moment des faits était jeudi présent au tribunal contrairement à l’audience précédente.

Appelé par le tribunal pour témoigner, il affirme reconnaitre cinq des 13 prévenus présents à l’audience : Ilunga Evariste, Ntumba Dialolo, Mbayi Daniel, Bula Bula et Vincent Manga.
Le 12 mars 2017, jour du meurtre des experts de l’ONU, Jean Bosco Mukanda affirme qu’il était présent à Moyo Musuila. Il dit avoir vu les miliciens conduits par Bula Bula et Vincent Manga juger et décider de l’exécution des experts.

«Je le connais très bien»

Après avoir écouté le prévenu Bula Bula, chef du village Moyo Musuila, sur les accusations de participation à un mouvement insurrectionnel, le tribunal a appelé à la barre Vincent Manga. Ce dernier est présenté par l’accusation comme le chef milicien qui dirigeait la milice Kamuina Nsapu dans la région de Bunkonde.

Dans sa déposition, Bula Bula- qui a démenti avoir fait partie de la milice- avait mis en cause M. Manga, l’accusant d’avoir dirigé la milice dans son village et ordonné l’exécution des experts de l’ONU.

Interrogé par le tribunal, Vincent Manga affirme ne s’être jamais rendu à Moyo Musuila. Il affirme avoir vu pour la première fois Bula Bula dans les locaux de l’ANR et de la DEMIAP à Kinshasa où il a été conduit après son arrestation à Bukonde en mars 2018.
Après ses déclarations, le tribunal appelle le témoin Jean Bosco Mukanda. Présent dans la salle, l’enseignant affirme tout de suite connaître «très bien» Vincent Manga. Ce dernier aurait ordonné son interpellation à une barricade tenue par les miliciens dans la région de Bunkonde et l’aurait condamné à payer 155 000 francs congolais (environ 100 dollars américains).

De son côté, M. Manga nie toutes ces accusations et affirme avoir vu Jean Bosco Mukanda pour la première fois le jour de son arrestation. Il précise alors que l’enseignant lui a pris des photos.
Parmi les douze autres prévenus, Jean Bosco Manga connaît également Bula Bula qu’il identifie comme l’un des leaders des miliciens à Moyo Musuila.
Le témoin affirme avoir vu le chef de village et Vincent Manga juger et décider de la mort des experts de l’ONU le 12 mars 2017.

«Des mensonges»

Des accusations rejetées, à son tour, par Bula Bula qui accuse Jean Bosco Mukanda d’être un milicien proche de Vincent Manga.
Le chef de village précise que c’est à M. Mukanda qu’il a remis les 35 000 francs congolais exigés par M. Manga pour le laisser libre.

Une somme d’argent que Mukanda aurait utilisée pour son propre compte. Ce qui aurait  conduit le chef milicien à le faire arrêter. Alors que les accusations fusent de toutes parts, chaque protagoniste accuse son accusateur de mensonges.

Quand le témoin désigne d’autres prévenus qui, selon lui, ont pris part à la réunion tenue dans la concession du chef Bula Bula le jour de l’arrestation des experts de l’ONU, les personnes pointées du doigt rejettent l’accusation. Il s’agit notamment d’Evariste Ilunga. Un prévenu que le témoin dit avoir vu se promener avec la tête de Zaida Catalan.

L’homme en rouge

Questionné par l’accusation sur sa présence dans la vidéo du meurtre des experts, Vincent Manga nie une nouvelle fois.
Alors que le témoin Jean Bosco Mukanda soutient que le présumé chef milicien était habillé en rouge le jour du meurtre des experts- le 12 mars 2017-, Vincent Manga dément, soutenant avoir été revêtu d’une tunique rouge le jour de son arrestation par des miliciens en mars 2018.

Au sujet de la vidéo, il explique qu’il ne s’agit pas de lui, et affirme avoir vu l’enregistrement lors de sa détention à Kinshasa.

Le tribunal militaire garnison de Kananga va poursuivre l’instruction de l’affaire le lundi 3 septembre prochain.
Vincent Manga et Bula Bula seront à nouveau à la barre pour répondre des accusations notamment de participation à un mouvement insurrectionnel, crimes de guerre par meurtre et mutilation.

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