Leila Zerrougui à Beni : « On ne peut pas permettre que des groupes négatifs continuent à déstabiliser cette région »

La Représentante spéciale du Secrétaire général de l’ONU en RDC, Leila Zerrougui, a effectué mardi 27 novembre une mission d’une journée à Beni au Nord-Kivu. Elle parle notamment des opérations militaires menées conjointement par les Forces armées de la RDC (FARDC) et la Mission de l’ONU en RDC (MONUSCO) contre les rebelles ougandais des ADF. Dans cette interview accordée à Radio Okapi, elle souhaite que la campagne électorale se déroule dans un climat de paix. Interview.

Radio Okapi: Madame Leïla Zerrougui. Vous venez d’effectuer une mission à Beni. Quel était l’objet de votre visite dans la région ?

Leïla Zerrougui : Vous savez quand l’opération « Usalama » a commencé malheureusement je n’étais pas en RDC, j’étais à New-York. J’étais en train de présenter le rapport au Conseil de sécurité. Quand j’ai eu l’information que nous avons perdu des soldats, et dès que je suis rentrée, je me suis dit que, je dois aller voir nos troupes, présenter mes condoléances aux contingents concernés, particulièrement ceux qui ont perdu des soldats, ceux qui ont eu des blessés, c’est-à-dire les Tanzaniens et les Malawites. Et bien évidement il y’avait aussi des Congolais qui sont tombés. Bien que j’aie échangé les lettres des condoléancés avec les autorités au plus haut niveau, je considérais que je devais venir aussi et j’ai demandé à rencontrer les général Mbangu pour lui présenter les condoléances au nom de la MONUSCO, au nom du secrétaire général pour les soldats qui sont tombés aussi main dans la main avec les nôtres.

Vous avez enregistré des pertes énormes, vous comptez poursuivre les opérations ?

Depuis que je suis là, c’est la deuxième opération offensive, mais celle-là, elle a été avec des conséquences durs pour nous et pour les FARDC. Et donc c’était important que je sois là. Je suis venue aussi pour encourager nos troupes. Je suis venu parler au leadership de la MONUSCO, et en même temps le leadership des FARDC, pour nous assurer que nous travaillons ensemble, nous coordonnons nos actions et que nous nous assurons que nous prenons toutes les mesures pour protéger nos soldats, pour leur doter des moyens. C’est vrai que dans une guerre il y a toujours des hommes qui tombent, mais nous assurerons que s’il y a quoi que ce soit qu’on peut prévenir on le prévient.

Depuis deux semaines maintenant, les FARDC appuyées par les forces de la MONUSCO ont lancé des opérations contre des ADF. Une offensive qui est saluée par les populations, la société civile et d’autres organisations. Ces opérations vont-elles se poursuivre jusqu’à la sécurisation de la région de Beni ?

Nous avons un mandat de mener les opérations offensives dans cette région. La FIB [Force d’intervention de la MONUSCO] est déployée pour ça. Actuellement, l’opération est en cours, elle ne s’est pas arrêtée. Nous continuerons de mener les opérations. C’est sûr, et il n’y a pas des doutes, ça fait partie du mandat et nous travaillons. Mais comme vous savez, je ne pourrais pas faire des déclarations plus que ça, sur quels sont les plans, ou quoi que ce soit. Ça c’est la charge des militaires. Nous n’avons pas d’autres choix, les populations sont affectées. Nous avons une épidémie d’Ebola, nous avons une situation où on ne peut pas se permettre que des groupes négatifs que ce soit ADF, que ce soit d’autres continuent à déstabiliser cette région. Donc il faudrait absolument qu’on travaille ensemble pour donner le minimum que les populations de cette région méritent, c’est-à-dire la paix, la stabilité, la sécurité. Nous sommes dans une période électorale il y’aura beaucoup des gens qui serons tentés de déstabiliser. Donc il faudrait qu’on soit vraiment assuré qu’on peut faire tout ce qui est en notre pouvoir pour aider la RDC à traverser ce moment difficile, mais extraordinaire dans son histoire pour que le 24 décembre on puisse rêver ensemble d’une paix durable dans ce pays.

Madame Leïla, pendant que vous étiez en train d’arriver à Beni, les notables ont manifesté pour soutenir l’action conjointe FARDC et MONUSCO contre l’ADF, en tant que cheffe de la MONUSCO, comment vous avez reçu cette démarche des notables de Beni ?

Les notables de Beni m’ont envoyé déjà une lettre de soutien pendant que je n’étais même pas encore de retour. Vous savez, vous ne pouvez pas gagner une guerre si vous n’avez pas le soutien de la population, c’est impossible. Vous ne pouvez gagner une guerre que si vous avez derrière vous la population. Parce que c’est ça d’abord l’objectif. Et donc pour moi d’abord je me réjouis parce qu’on est là pour autre chose que pour rassurer, stabiliser et aider la RDC. Donc ça me fait plaisir que la population voie que nous faisons un travail dans l’intérêt de la population. Ça me rassure sur nos relations futures. Vous savez, ces manifestations donnent beaucoup de courage à nos soldats plus que moi, nos soldats, vos soldats, les militaires congolais. Sentir que vous avez la population derrière vous, vous allez faire plus que quelqu’un qui vient juste faire un travail qui est payé. Vous savez on est des êtres humains ça nous touche.

La campagne électorale a débuté depuis maintenant quelques jours, quel sera l’apport de la MONUSCO pour que les élections se tiennent d’une manière apaisée dans la région de Beni où la population fait face d’abord à l’insécurité et puis à l’épidémie à virus Ebola ?

D’abord, je félicite la population congolaise, l’opposition, la majorité, le gouvernement, on est entré dans la première semaine et on voit qu’il ya un effort des part et d’autre pour que cette campagne ne soit pas une campagne de tous les dangers. Il y a un effort que nous devons tous saluer parce que comme je le dis, je le répète à chaque fois, les élections sont un processus, l’opposition et la majorité sont des adversaires mais pas des ennemis dons c’est important ce qui est en train de se faire. Nous, on est partenaire des autorités nous travaillons avec la CENI, l’opposition, la majorité. Parce que notre rôle, moi j’ai un mandat des bons offices pour veiller à ce que les choses se passentcorrectement et je passe le message aux uns, aux autres.

La CENI peut espérer à un appui de la MONUSCO pour le bon déroulement des élections ?

Nous avons un appui technique que nous faisons depuis toujours avec la CENI pour justement s’assurer que le travail qui doit se faire se fait correctement afin que les élections se tiennent correctement. Nous formons les personnes qui doivent être déployées [sur le terrain]. Nous sommes en train de le faire bien évidement, la RDC a décidé d’organiser ses élections par elle-même, de ne pas demander un appui logistique aux partenaires sauf en cas de besoin. C’est ce que les autorités nous ont dit, nous n’avons pas d’objections à ça. J’ai dit que, je serai la première à applaudir si cela se fait avec les moyens de la RDC parce que ça veut dire qu’on a développé les capacités et ce n’est pas négatif au contraire c’est positif, mais on reste quand même mobilisé parce qu’on a un mandat d’appui qui nous vient du Conseil de sécurité. S’il y a un besoin, si la situation nécessite un appui de notre part nous sommes là pour le faire.

Interview réalisée par Martial Papy Mukeba.

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