Le Franc congolais en chute libre, Adolphe Muzito s’investit

Une table de cambiste à Kinshasa

Une table de cambiste à Kinshasa

Le 1er ministre Adolphe Muzito s’est entretenu jeudi avec le ministre des Finances, le gouverneur de la Banque centrale du Congo, BCC, et le président de l’association congolaise des banques. Il s’agissait d’analyser les causes et trouver des solutions contre la dépréciation accélérée du Franc congolais face aux devises étrangères. Le dollar américain s’est changé, jeudi soir, contre 740 FC sur le marché noir. En 3 mois seulement, la monnaie locale a perdu 20% de sa valeur.

C’est depuis septembre dernier que le Franc congolais est de plus en plus instable.
Il faut à ce jour entre 720 et 740 Franc congolais pour avoir 1 dollar américain. Selon la Banque centrale du Congo, cette situation s’explique par plusieurs causes, notamment la baisse des ressources provenant de l’exportation des matières premières due à la crise financière et économique internationale, la situation sécuritaire à l’Est du pays, l’augmentation de la demande en devises suite au besoin pour les opérateurs économiques de reconstituer leurs stocks après les ventes de fin d’année, la rétention spéculative des devises couplées au phénomène d’anticipation et d’inquiétude essentiellement sur le marché de change parallèle de Kinshasa.

Pour donner des réponses au problème, la Banque centrale du Congo annonce qu’elle va intervenir régulièrement sur le marché de change jusqu’à stabiliser la situation. Elle annonce également l’augmentation de son taux directeur de 28 à 48% l’an. La cellule a également proposé la mobilisation diversifiée et plus accrue des recettes fiscales, douanières, administratives, domaniales, judiciaire et de participation, ainsi que le maintien de l’exécution des dépenses sur base caisse pour contenir le niveau de la masse monétaire, et, enfin, le maintien d’un dialogue permanent avec les opérateurs du secteur financier pour tenter de gérer ensemble la situation actuelle du marché de change.

Lem’s Kamwanya : l’inflation va augmenter la misère du Congolais

Pour l’expert en économie chargé des projets à Copirep, les mesures arrêtées par la Banque centrale ne sont pas suffisantes. La BCC n’alimente pas efficacement les réserves d’échanges en devises pour arrêter l’accroissement du Franc congolais sur le marché. En outre elle recourt aussi souvent à la planche à billet qui selon lui doit être arrêtée.

Selon Lem’s Kamwanya, il y a donc lieu de craindre pour les conditions sociales des Congolais, si ces observations ne sont pas prises en compte : « Les opérateurs économiques agissent le plus souvent par anticipation. S’ils se disent que le taux est à 740 ou à 720, eux anticipent déjà que le taux peut changer demain, le temps qu’ils renouvellent leur stock. Ils peuvent commencer à vendre le produit, non pas avec l’équivalent de 720, mais plutôt à 750 et pourquoi pas à 800. Ce qui va occasionner encore une augmentation du prix. Or, lorsque le prix augmente, il y a une inflation. Cela réduit le niveau de revenus, et accroît la misère parce que ça va diminuer la consommation, et même arriver à décourager le niveau de production. Je pense qu’il faut vraiment tirer attention à cette situation inquiétante qui risque non seulement d’accroître la misère du Congolais devant la situation sociale un peu difficile, mais qui risque aussi d’aboutir à une suite de consommation qui, à son tour, va avoir des effets sur le niveau de production, avec d’éventuels effets sur le niveau de l’emploi. En effet, si les opérateurs économiques constatent que les produits ne sont pas fortement consommés, ils vont procéder par des congés techniques qui peuvent, à la longue, déboucher sur des suppressions d’emploi. Et ça va rendre encore difficile les conditions sociales de la population congolaise. »